Table ronde sur la souveraineté musicale autochtone
Le personnel et le conseil d’administration d’Orchestres Canada pleurent la perte des 215 enfants autochtones dont les dépouilles ont été retrouvées enterrées sur les lieux de l’ancien pensionnat indien de Kamloops à la Première nation de Tḱemlúps te Secwepemc depuis que cette conversation a eu lieu et reconnaissent la douleur longtemps négligée de leurs familles ainsi que les recherches menées sur les terrains de pensionnats partout au Canada. Nous sommes de tout cœur avec les survivants, les familles, les amis et tous ceux qui pleurent la perte de ces enfants et des nombreux autres enfants autochtones dont les dépouilles n’ont toujours pas été retrouvées. Nous encourageons nos membres à faire un don à un organisme de direction autochtone qui appuie les survivants des pensionnats et ceux qui leur sont chers (Indian Residential School Survivors Society, Fondation autochtone de l’espoir, le Centre national pour la vérité et la réconciliation, et Orange Shirt Day) et à se renseigner sur le legs courant des pensionnats en consultant le Rapport final et les appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation. Orchestres Canada a fait un don à l’Indian Residential School Survivors Society à la mémoire de ces enfants.
Le mercredi 26 mai, OC a accueilli Andrew Balfour, Ian Cusson, Michelle Lafferty, Beverley McKiver, Melody McKiver, Jessica McMann and Sonny Ray Day Rider à une table ronde sur la souveraineté musicale autochtone animée par Cris Derksen. La conversation s’est inspirée de la Déclaration sur la souveraineté musicale autochtone, que les panélistes ont rédigée (de pair avec Jeremy Dutcher et Corey Payette) en 2019 à l’occasion du Rassemblement pour la musique classique autochtone canadienne à Banff.
La table ronde s’est spécifiquement concentrée sur les expériences des artistes qui apprennent et produisent de la musique classique en tant membres des peoples autochtones et sur la façon dont les orchestres peuvent favoriser des échanges mutuellement enrichissants, réciproques et respectueux avec les artistes autochtones au sujet tant du contenu du programme que de l’expérience de créer ensemble.
Remarque : le terme “autochtone” est un terme générique qui désigne une diversité de peuples des Premières nations, des Inuits et des Métis. En général, lorsque vous vous adressez à un artiste, il est préférable d’utiliser le nom spécifique de la Première Nation ou de la communauté dont il ou elle fait partie. En cas de doute, utilisez les termes que les artistes utilisent pour se décrire
L’équipe d’OC a réuni ci-dessous certains des principaux enseignements tirés de la séance; mais nous vous encourageons aussi à visionner l’enregistrement et à écouter directement les artistes. Les ressources que les participants ont mises en commun durant la séance de clavardage Zoom sont incluses à la fin.
Contrôle, accessibilité et accueil
Il faut commencer par reconnaître et comprendre la mentalité anti-autochtone perpétuée consciemment et inconsciemment par les orchestres, leur passé colonial et leurs pratiques eurocentriques, sur les plans artistique et opérationnel. Une formation en sécurité culturelle autochtone peut aider les orchestres à déterrer les préjugés intrinsèques et à mieux comprendre leurs partenaires autochtones (voir la liste des ressources ci-dessous). Comme Andrew l’a souligné, un spectacle fait appel à beaucoup de monde, y compris les agents de sécurité, les placiers, les artistes, l’équipe de plateau et le personnel. Tous les intervenants doivent être parties prenantes pour faire en sorte que chaque interaction mette les artistes et les membres du public à l’aise et les incite à revenir! Un examen du racisme intégré dans les structures aidera aussi les membres d’autres groupes racialisés à se sentir accueillis dans les salles de concert. Mais la tâche ne s’arrête pas là. La représentation compte – l’institution représente-t-elle le paysage culturel de la communauté? Les pratiques de travail sont-elles un modèle d’inclusion? Les compositeurs sont par exemple invités à faire leurs commentaires au chef d’orchestre plutôt qu’à l’orchestre : quels obstacles à la collaboration et à l’établissement de relations est-ce que cela crée?
Prendre le temps : ce que cela signifie pour les artistes, le processus de création et nos relations
Il faut du temps et de l’effort pour bâtir des relations; ce n’est pas un processus instantané. Les grandes collaborations avec des créateurs autochtones exigent d’apprendre à se connaître les uns les autres. Cela peut prendre diverses formes : un repas partagé avant une répétition, une communication quotidienne pour voir comment vont les choses ou la disposition du chef d’orchestre à discuter avec le compositeur du sens ou des muances musicales d’une œuvre. Un orchestre peut hésiter, faute de ressources, à consacrer du temps à l’établissement de relations, mais cette étape favorise la création d’un milieu ouvert et honnête dans lequel les artistes, autochtones et autres, se lient et s’épanouissent comme communauté. Il peut être édifiant, enrichissant et bon pour la qualité générale du travail d’apprendre à se connaître.
Collaboration authentique plutôt que
symbolique : commande d’œuvres autochtones
Un orchestre ne peut pas tout simplement demander le sceau d’approbation d’un Aîné ou ajouter du chant guttural à un morceau sans contexte ni contrôle autochtone. Les collaborations offrent plutôt une occasion de réfléchir en profondeur sur nos communautés, de se renseigner sur les peuples autochtones à proximité et de cultiver progressivement des relations. Pour établir ces relations, il faut éviter toute forme d’exploitation (il est important d’indemniser les intéressés pour leur temps et leur expertise) et veiller à ce que les projets organisés reçoivent autant de soin, de respect et de temps que ce qui est accordé au répertoire traditionnel. Les artistes autochtones ne voudront pas nécessairement composer des œuvres dans la tradition classique occidentale ou dans ce qui vous semble « un style autochtone ». Il est aussi important de reconnaître que « l’art autochtone » et les « artistes autochtones » ne forment pas un ensemble homogène quant à leur expérience ou aux récits qu’ils veulent raconter dans leur musique. Pour faire de l’espace, il faut valoriser et mettre de l’avant des conceptions multiples de la musique. Il faut respecter les choix de chaque artiste.
Repenser l’éducation et les ressources
Il existe des disparités dans l’accès aux ressources, à l’éducation musicale, à l’enrichissement et à des possibilités. « Nos communautés, a fait observer Melody, ont l’impression de devoir faire du rattrapage tandis que d’autres ont 50 ans d’avance. » Le fardeau financier que représentent des leçons et l’entretien d’un instrument pendant plusieurs années constitue un obstacle à l’accès à des études supérieures. Le milieu orchestral est extrêmement concurrentiel, et des obstacles comme le lieu géographique, le racisme systémique et le manque de fonds limitent l’avancement dans ce milieu. Il faut tenir compte de ces obstacles au moment de lancer des invitations à participer : décourage-t-on la participation de personnes talentueuses qui ont opté pour un autre parcours? Ian a fait allusion à sa propre expérience comme premier compositeur Carrefour en résidence au Centre national des Arts. Il ne détenait pas de diplôme officiel en composition lorsqu’il a été choisi pour profiter de cette occasion, mais celle-ci lui a permis de perfectionner ses compétences comme compositeur professionnel. Pour favoriser un écosystème orchestral plus diversifié, il faut repenser l’importance attachée aux études universitaires ou de conservatoire et mettre en valeur les voix créatives de ceux et celles qui ont des expériences variées.
L’avenir
Il faut être prêt à réfléchir à la position philosophique que représente la musique classique ainsi qu’aux possibilités qui s’offrent quand on invite la participation de récits canadiens et autochtones plus diversifiés (y compris des artistes qui les racontent). En ce qui concerne l’avenir, les orchestres canadiens peuvent créer des occasions pour les créateurs autochtones et aider à combattre l’eurocentrisme et à décentrer ce qui est « blanc » dans la musique classique. Beaucoup de commandes sont pour des morceaux d’ouverture de trois à cinq minutes qui ne posent généralement pas tellement de risque. Pourquoi ne pas prendre plus de risques? Les orchestres de jeunes sont particulièrement bien placés pour cela; comme Ian l’a signalé, ces orchestres sont un terrain d’entraînement pour les orchestres professionnels et servent à transmettre les valeurs que les musiciens et travailleurs orchestraux conservent pendant toute leur carrière.
OC est reconnaissant envers les panélistes d’avoir partagé leurs observations. Nous sommes impatients de poursuivre les conversations, en misant sur la vérité, l’établissement de relations et la quête d’une réconciliation entre les orchestres canadiens et les peuples autochtones.
Enregistrement de la table ronde
Ressources partagées durant le clavardage
La déclaration sur la souveraineté musicale autochtone
Le texte de la déclaration sur la souveraineté musicale autochtone se trouve à l’Annexe E du rapport L’orchestre retentit d’OC ainsi qu’au site Web de l’Indigenous Performing Arts Alliance.
Formation
[Disponible en français et anglais] Le parcours – Votre voyage au sein du Canada autochtone de NVision Insight Group (Note : L’Association canadienne de musique sur scène offre à ses membres un rabais pour ce cours cliquez ici – veuillez communiquer avec [email protected] au sujet du prix offert aux membres d’OC)
San’yas Indigenous Cultural Safety Training (actuellement en Colombie-Britannique, au Manitoba et en Ontario; d’autres provinces viendront s’ajouter).
Decolonize First Workbook by Ta7talíya Michelle Nahanee.
Challenge Accepted: Consultations.
Lignes directrices et politiques
Indigenous Performing Arts Alliance Smudging Document.
Barème des tarifs minimums de CARFAC RAAV
Livres et essais
Hungry Listening de Dylan Robinson
Music Theory and the White Racial Frame de Philip Ewell
Essai de Dylan Robinson To All Who Should Be Concerned.
Bourses
American Indian Musicians’ Scholarship (États-Unis).
Appuyer la vérité et la réconciliation
Comité de vérité et réconciliation: Rapport final et les appels à l’action
Faire un don à un organisme de direction autochtone qui appuie les survivants des pensionnats et ceux qui leur sont chers: Indian Residential School Survivors Society, Fondation autochtone de l’espoir, le Centre national pour la vérité et la réconciliation, et Orange Shirt Day
How to support Tḱemlúps te Secwepemc First Nation