Confiance, transparence et vérité

Marion Newman

Le Rapport de la Commission de vérité et de réconciliation de 2015 et ses appels à l’action ont ébranlé de nombreuses hypothèses courantes au sujet des relations entre la communauté autochtone et celle des colonisateurs au Canada. En réponse à ce rapport, nombre d’orchestres et d’autres institutions culturelles ont commencé à examiner leurs relations avec les communautés et à repenser leurs modes de collaboration et de partenariat avec les nations, les peuples et les organisations autochtones.

Suivant la création en 2017 d’un conseil consultatif sur la communauté autochtone au Regina Symphony Orchestra, beaucoup de travail a été accompli pour développer cette relation. Nous nous sommes entretenus avec le directeur musical du RSO, Gordon Gerrard, et la mezzo-soprano Marion Newman, qui siège à ce conseil, pour en savoir plus au sujet de cette initiative.

Le début
Gordon Gerrard

Le conseil consultatif sur la communauté autochtone du RSO a vu le jour après la nomination d’un nouveau membre du conseil d’administration, Audra Young, de la Première Nation de Cowessess. Il a été officialisé en raison de la consultation qu’a nécessitée un important projet de rayonnement mené avec Buffy Sainte-Marie; un des premiers projets subséquents a été le nouveau Forward Currents Festival. Le conseil consultatif était initialement composé de 12 membres qui se réunissaient chaque mois surtout pour conseiller le nouveau directeur musical, Gordon Gerrard, et la directrice générale de l’époque, Tanya Derksen, au sujet d’éléments de programmation autochtone pour la saison de l’orchestre. « Il n’y a pas de livre de règlements pour ce genre de chose, affirme Gordon, mais nous voulions nous assurer de créer une relation salutaire permanente pour les deux parties, plutôt qu’un simple échange ponctuel. »

Soucieux d’accorder le temps voulu à l’évolution de ces conversations, le groupe se réunit maintenant moins fréquemment, mais ses conseils touchent à un plus grand nombre d’aspects des activités du RSO. Tout est interdépendant. D’autres orchestres suivent ce modèle; le Vancouver Symphony Orchestra, par exemple, a mis sur pied son propre conseil sur la communauté autochtone.

Risques et vraie consultation

Malgré une certaine appréhension quant à la voie que l’orchestre et le conseil allaient emprunter, les parties comprenaient l’importance et l’ouverture de cette initiative. Marion Newman attribue essentiellement sa disposition à siéger au conseil à sa relation solide avec Gordon et sa confiance en lui. « On nous demande constamment nos conseils sur divers projets, dit-elle. C’est plus rare que l’organisme écoute vraiment. Mais parce que j’avais déjà confiance en Gordon, je savais que l’orchestre écouterait ce que nous avions à dire. »

Marion et Gordon reconnaissent tous deux qu’il s’agit d’un travail soutenu, lent et de longue haleine. Il exige de la transparence de la part de l’orchestre, qui doit partager des choses qu’il n’a pas l’habitude de partager avec des groupes externes. « Nous en sommes encore à l’aspect vérité de la vérité et la réconciliation », affirme Marion. Le travail est pénible mais nécessaire si l’on veut aboutir à une consultation et un partenariat véritables. L’expérience a en définitive été positive pour le RSO. Les opinions du conseil consultatif touchent désormais tous les aspects de son activité, comme les déclarations de reconnaissance du territoire; elles précisent le sens véritable de la consultation et aident tous les intervenants à trouver leurs propres manières de participer à cette tâche.

Le Festival Forward Currents

Le premier projet pour lequel on a consulté le conseil consultatif a été le nouveau Forward Currents Festival. « Chaque année le festival gravite autour d’un enjeu socialement pertinent pour notre communauté à Regina, signale Gordon. Le premier, en 2018, était centré sur la vérité et la réconciliation; celui de 2019, sur la sensibilisation à la santé mentale. »

« C’est un moyen très direct de rejoindre des gens qui croient que l’orchestre n’est pas pour eux », ajoute-t-il. En présentant l’orchestre ailleurs que dans la salle de concert traditionnelle, le festival a rejoint un public entièrement nouveau qui n’a peut-être jamais songé à assister à un concert de musique orchestrale traditionnel. Marion dit avoir été très touchée au premier festival. « C’était incroyable de voir des Autochtones émus d’entendre l’orchestre raconter leur histoire et, pour eux, de se rendre compte que des membres non autochtones du public étaient émus par des histoires autochtones. »

Prochaines étapes

Le conseil consultatif commence à se tourner vers les saisons futures pour ce qui est du contenu de la programmation et de la manière d’aborder les partenariats. Il se penche aussi sur les moyens de veiller à ce que ce travail ait un effet durable sur le RSO. Une formation en compétence culturelle s’impose, et il espère établir bientôt un moyen qui permettra aux nouveaux musiciens, employés et membres du conseil de l’orchestre de suivre la formation voulue qui leur permettra de travailler en collaboration respectueuse avec lui et les autres communautés avec lesquelles le RSO pourrait s’associer.

Le travail est ardu et prend du temps. Il doit reposer sur des relations personnelles fortes, la confiance et la transparence.